Lors de sa conférence de presse de rentrée 2022 le ministre de l’Éducation nationale Pap Ndiaye a confirmé son adhésion pleine et entière au projet dévastateur pour les personnels et les élèves de la voie professionnelle scolaire du Président de la République : les lycées professionnels seront réformés en profondeur sur le modèle de l’apprentissage.
Alors que le gouvernement et ses ministres du travail successifs n’ont de cesse de présenter l’apprentissage comme une solution magique contre tous les maux du pays en omettant d’ailleurs d’évoquer sa face cachée peu glorieuse, un ministre relevant du ministère de l’Éducation nationale devrait respecter son devoir de défendre une scolarisation ambitieuse pour tous les jeunes et surtout ceux issus des classes sociales défavorisées. Ce ne fut aucunement le cas pour Pap Ndiaye qui n’a eu qu’une seule phrase, vide de sens et de 10 secondes, pour évoquer cette voie du lycée au cœur d’enjeux socio-économiques essentiels pour notre pays.
Il annonce en revanche une prétendue volonté de lutter contre les discriminations et le décrochage scolaire. Or l’apprentissage en bac pro c’est 40 % de jeunes qui, par des ruptures de contrats subies, restent sur le carreau, sans qualification, obérant de manière alarmante leur avenir professionnel. L’apprentissage est aussi un système structurellement défavorable aux filles (70 % de garçons) et aux jeunes issus de l’immigration maghrébine et subsaharienne. Est-ce ce modèle qu’il veut appliquer aux lycées professionnels qui aujourd’hui accueillent 630 000 jeunes sans condition ?
Le ministère de l’Éducation nationale veut calibrer les filières des lycées professionnels vers les secteurs en pénurie d’emplois, désertés aujourd’hui par les actifs du fait des conditions salariales et de travail déplorables. Ce qui revient à instrumentaliser l’orientation des jeunes de 15 ans vers les métiers les plus pénibles et les moins valorisés. Ce choix est purement scandaleux. C’est aussi une vision étriquée et dangereuse de la formation professionnelle scolaire que de lui assigner comme objectif de répondre essentiellement aux besoins immédiats et locaux des entreprises. Pour le SNUEP-FSU, la carte des formations doit évoluer non pas dans l’intérêt particulier de quelques firmes ou branches professionnelles mais dans l’intérêt général du pays relativement aux défis qui se posent à la société : la transition écologique, la nécessaire réindustrialisation, la prise en charge du grand âge, le renforcement de la Fonction publique.
Le ministère de l’Éducation nationale annonce aussi l’augmentation de 50 % des stages dès la rentrée 2023. Les augmenter de 50 % c’est réduire d’autant la présence des élèves dans nos lycées professionnels. Mathématiquement, ce sont des coupes sombres dans nos horaires disciplinaires auxquels il faut s’attendre et, en toute logique, des suppressions massives de postes de professeurs de lycées professionnels dans les années à venir. Pour les jeunes, c’est un renoncement sans précédent de la part du ministre à la dimension éducative et émancipatrice de leur formation et une entrave organisée à leurs poursuites d’études. C’est aussi laisser à penser un mensonge tenace concernant le rôle formateur de l’entreprise. En stage les élèves sont une main-d’oeuvre comme les autres, ils apprennent « sur le tas » uniquement des gestes techniques, sans qu’aucun personnel n’ait du temps dédié pour les accompagner. Le ministère remet au goût du jour la vision extrêmement réactionnaire et restrictive de la formation professionnelle des jeunes, datant d’un autre siècle, plutôt que de renforcer un enseignement global et équilibré entre savoirs généraux et savoirs professionnels dans nos lycées publics.
Le SNUEP-FSU s’engage à porter ses exigences fortes d’augmentation des salaires et à dénoncer et combattre partout ce projet dévastateur et rétrograde du gouvernement et du ministère de l’Éducation nationale pour la voie professionnelle.
Le SNUEP-FSU oeuvrera à la mise en place d’une intersyndicale large et unitaire pour contrer ce projet. Il appelle tous les personnels de la voie professionnelle à se saisir de la pré-rentrée et des heures d’informations syndicales pour échanger avec les collègues des moyens d’actions à mettre en œuvre.