Depuis lundi 26 mai, dans tous les LP et SEP de notre académie et dans toute la France, le « Parcours en Y » a été mis en œuvre. Les élèves de Terminale Bac Pro ont terminé leurs épreuves du BAC et ont été divisés en deux catégories pour les six prochaines semaines : celles et ceux qui ont choisi le « Parcours poursuite d’études » et celles et ceux qui ont choisi le « Parcours Insertion ».

Depuis un an, le SNUEP-FSU et la quasi totalité des organisations syndicales ont alerté sans relâche sur les risques de cette réforme : amputation de six semaines de cours, désorganisation des établissements, inégalités entre élèves, décrochage généralisé. Malgré cela, le ministère s’est entêté… et dès le premier jour de mise en place effective, les faits nous donnent malheureusement raison.
Notre section académique a lancé dès le 9 mai, un questionnaire destiné aux 2500 PLP de l’académie. De très nombreux témoignages nous ont été envoyés (ils sont publiés ici) et les données chiffrées que nous avons pu recueillir montrent une réalité d’ores et déjà inacceptables.
Note : les diagrammes ci-dessous ont été réalisés à partir de données partielles, celles contenues dans les déclarations recueillies dans les questionnaires complétés par les collègues qui ont accepté de participer à l’enquête. Nous ne prétendons pas donner ici des statistiques scientifiquement éprouvées, mais des tendances. C’est pourquoi nos commentaires sont rédigés au conditionnel.
Constat n°1 : une préparation très inégale dans les LP et SEP de l’académie
Dans notre enquête, nous avons d’abord demandé aux collègues comment ils ont été sollicités par les Chefs d’Établissement pour préparer la mise en œuvre du Parcours différencié (suivi des stages, contenu des modules « poursuite d’études », gestion des effectifs, etc…). D’un établissement à l’autre, les collègues témoignent de situations très extrêmement différentes.

Dans la moitié des établissements, les chefs d’établissement auraient convoqué de 2 à 5 fois les équipes pour préparer la mise en œuvre du « Parcours en Y », comme par exemple à la SEP du LPO d’altitude – Suzanne Joulié Roos (Briançon -05), ou au LP La Calade (Marseille -13).
Mais on constate que dans près de 45% des établissements, les chefs d’établissement auraient fait le service minimum ! Avec une seule réunion comme au LP Colbert (Marseille -13) ou au LP l’Estaque (Marseille -13) voire même aucune réunion comme au LP Beau de Rochas (Digne -04) ou au LP Domaine d’Eguilles (Vedène -84).
Enfin, dans quelques établissements, des chefs d’établissements particulièrement zélés auraient organisé plus de 5 réunions obligatoires, comme au LP Brochier (Marseille – 13).
Le premier enseignement que nous pouvons en tirer est que cette réforme mise en place en dépit du bon sens par les quatre ministres qui se sont succédé depuis janvier 2024 (!) n’a pas provoqué un engouement unanime de la part des personnels de direction.
Mais cela pose le grave problème de l’inégalité des situations d’un établissement à l’autre, avec ici des équipes qui ont dû multiplier les séances de travail pour élaborer des projets dans le cadre très flou des directives du Ministère, et là des collègues totalement livrés à eux-mêmes.
Constat n°2 : des établissements désorganisés
Nous avons demandé aux collègues si l’organisation de leur établissement a été modifiée avec la mise en œuvre du Parcours différencié et si leur emploi du temps personnel a été bousculé.

D’après les témoignages recueillis, la moitié des LP et SEP auraient vu leur organisation profondément modifiée, avec des regroupement d’élèves de classes de Terminales BAC Pro différentes, des plages horaires hebdomadaires fusionnées, des modules pluridisciplinaires mis en place, des emplois du temps remodelés. Ces modifications auraient rarement été réalisées sur la base de réunion de concertation (conseils pédagogiques, Conseils d’Administration), et auraient été annoncées aux équipes seulement quelques jours avant du lancement effectif de la nouvelle organisation.
De plus, dans certains établissements, l’organisation des épreuves à partir du 12 mai aurait conduit à la neutralisation complète des activités pour tous les élèves : 1ère et 2ème année CAP, 2nde et 1ère Bac Professionnelle qui auraient donc été privés de cours pendant une semaine complète, voire plus dans certains cas.
Là encore, il est notable de constater que dans l’autre moitié des LP et SEP, aucune modification des emplois du temps et des structures pédagogiques n’aurait été mise en place !
Constat n°3 : des inégalités chez les élèves
Notre questionnaire a enfin permis de recueillir une estimation de la part des élèves ayant choisi l’une ou l’autre des options du « Parcours en Y ». Là encore, les écarts d’un établissement à l’autre sont impressionnants.

Dans près de la moitié des établissements les élèves seraient plus de 75% à avoir choisi le « Parcours Insertion ». Ce serait le cas au LP Gambetta (Aix – 13), au LP La Floride (Marseille – 13), à la SEP René Char (Avignon – 84)… On dépasserait même les 90% à la SEP du LPO Hôtelier (Marseille – 13), avec des filières professionnelles correspondant à des secteurs économiques « en tension » qui se régalent de cette main d’œuvre disponible et gratuite.
Mais il y a aussi des établissements où une forte majorité des élèves auraient choisi de rester à l’école, comme à la SEP Victor Hugo (Carpentras – 84) ou à la SEP Jean Monet (Vitrolles -13).
Constat n°4 (à confirmer) : un décrochage massif à prévoir dès les prochains jours
Depuis ce matin, lundi 26 mai, les remontées du terrain montrent que les effectifs s’effondrent dans les classes dès la première journée de mise en place du « parcours Poursuite d’études ». On nous signale dans certains établissements l’abandon de l’outil Pronote pour l’appel des terminales au profit d’un système d’appel « sur papier » fait « à la demi-journée » par les équipes de vie scolaire. D’après ce que nous disent les collègues dans plusieurs LP ou l’absentéisme est déjà important, les rares élèves qui ont fait l’effort de se présenter ce matin auraient clairement annoncé leur intention de ne pas poursuivre l’expérience.
Concernant les élèves en stages, on peut s’attendre là aussi à la plus grande confusion, certains établissements n’ayant même pas prévu d’organiser le contrôle de la présence des stagiaires.

Je suis PLP : que puis-je faire pour alerter, dénoncer, protester ?
Une campagne nationale intersyndicale sera lancée dans les prochains jours pour recueillir les témoignages et les données chiffrées dans le but affiché d’obtenir le retrait de cette réforme et de revenir en 2026 à un calendrier normal.
Ne restez pas seul.e !
- Appelez le SNUEP-FSU au 04 91 13 62 81
- ou écrivez à sa.aix-marseille@snuep.fr
Pour alerter sur les situations inadmissibles qui ne vont pas manquer de se multiplier dans ce désordre voulu par le gouvernement, pour dénoncer les conséquences de cette réforme tant pour nos élèves que pour notre profession, pour protester tous ensemble contre la destruction programmée de l’enseignement professionnel public sous statut scolaire.